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Innovations pour une agriculture urbaine durable

L’effervescence des projets d’agriculture urbaine depuis 2012 (en France) se traduit par une mobilisation de nombreuses collectivités qui ont introduit ce terme dans leur Projet Alimentaire Territorial (PAT) : Paris, Albi, Mulhouse, Dijon, Romainville, Roubaix, Saint-Denis, Lyon… On voit ainsi l’émergence de nombreuses formes d’agriculture urbaine poursuivant des objectifs variés : leur point commun devrait être de mieux répondre aux enjeux du développement durable.

À la croisée de l’Agritech et de la Foodtech, de nombreuses startups dessinent de nouveaux marchés proposant des produits ou services innovants :

Fondations, investisseurs et grandes entreprises suivent de près ces nouveaux marchés : AeroFarms a levé 110 M$ entre 2010 et 2017, Gotham 43 M$ entre 2013 et 2018 et Agricool 12 M€ depuis 2016. Parmi les secteurs qui investissent dans l’agriculture urbaine : restauration et hôtellerie, numérique, électronique, distribution, santé, gestion de l’eau et traitement des déchets, immobilier… Ils apportent de nouvelles visions, compétences et technologies (éclairages – LED, X-Ponies[1], régulation de l’air, substrat, semences) qui transforment le métier d’« urbiculteur » et favorisent l’innovation :

[1] Regroupe, dans ce document, aquaponie, hydroponie, aéroponie, ultraponie qui sont toutes des formes d’agricultures urbaines avec une forte affinité pour des technologies avancées – numérique, énergies renouvelables, biotechnologies, matériaux…

L’agriculture urbaine semble pouvoir bénéficier de tendances de consommation récentes :

  • locavorisme[1]et reterritorialisation des systèmes alimentaires ;
  • engouement des consommateurs pour les modes de production « sans pesticide » dont se rapprochent la plupart des agriculteurs urbains.

Dans la perspective d’une croissance de la population, la ville doit être le lieu d’habitat privilégié pour éviter l’étalement du bâti et l’artificialisation des sols, et l’agriculture urbaine contribue durablement à créer un environnement propice à cette densification[2].

[1] Mouvement prônant la consommation de nourriture produite dans un rayon restreint autour de son domicile, afin de limiter les impacts environnementaux de l’alimentation (Source « Les agricultures urbaines : potentiel de développement et impacts sur l’environnement et l’aménagement des territoires », La Fabrique Ecologique 2018)
[2] Les prévisions des Nations Unies pour la France s’établissement à plus de 85% de population urbaine en 2050 (Source : Nations Unies 2014, http://esa.un.org/unpd/wup/Country-Profiles/)

Durabilité : quels enjeux pour les agriculteurs urbains ? 

L’intention initiale est souvent de contribuer à réduire l’impact environnemental, mais la mise en œuvre des projets se heurte à des contraintes qui dégradent le bilan environnemental. La professionnalisation de l’activité est nécessaire pour garantir une pérennité de l’activité d’agriculture en ville. Elle passe par la clarification du statut d’agriculteur urbain et de son régime social et fiscal, la clarification de la réglementation d’accès au foncier urbain, et le développement de formation professionnalisation qualifié et non qualifié. Plusieurs facteurs intrinsèques à l’agriculture urbaine rendent son équilibre économique délicat, mais des leviers peuvent s’activer face à ces difficultés.

La production de plantes à forte valeur ajoutée permet d’assurer une rentabilité sur une petite surface. Ainsi la ferme Bien Elevées s’est lancée dans la culture du safran sur un toit de 1 800 m² du Monoprix Bièvre dans le 13e arrondissement de Paris, qui s’engage à vendre une partie de la production. Cette épice, la plus chère du monde, se vend environ 30 000 € / kg.

Si la vocation sociale et culturelle (réinsertion, lien intergénérationnel, entre salariés, ateliers pédagogiques, etc.) des projets est souvent mise en avant, la reconnaissance des personnels (salariés et bénévoles) est questionnée (statut du bénévolat, précarité des salariés, conditions de travail).

L’insertion des fermes urbaines dans les territoires est favorisée par la réflexion sur l’aménagement, l’approvisionnement alimentaire développée dans le cadre des Projets Alimentaires Territoriaux (PAT)[1].

Le Réseau national RnPAT a identifié que 26 des 49 PAT en cours de mise en œuvre intègrent l’agriculture urbaine. Villes et métropoles mettent à disposition des terrains, apportent des subventions, favorisent les nouvelles filières via l’utilisation des marchés publics (ex. : restauration collective) et la réglementation (ex : planification urbaine) de façon aux filières classiques qui fournissent l’essentiel de l’alimentation.

[1] PAT : Projet Alimentaire Territorial prévus par la loi d’avenir pour l’agriculture 2014. Ils « répondent à l’objectif de structuration de l’économie agricole et de mise en œuvre d’un système alimentaire territorial. Ils participent à la consolidation de filières territorialisées et au développement de la consommation de produits issus de circuits courts, en particulier relevant de la production biologique »